« Un dernier conseil avant de commencer : fixez-vous un objectif et écrivez-le. Quel que soit l’objectif, l’important est de le fixer pour savoir ce que vous recherchez, et donc, de l’écrire. Il y a un élément de magie dans le fait d’écrire quelque chose. Donc fixez-vous un objectif et écrivez-le. Lorsque vous l’aurez atteint, fixez-en un autre et écrivez-le aussi. Vous verrez le résultat[35]. »
Il est bien connu que la beauté représente un avantage dans les relations sociales. Des recherches récentes montrent cependant que nous sous-estimons peut-être gravement la portée de cet avantage. Il semble que l’apparence physique produise un effet de déclic.
Les recherches montrent que nous attribuons automatiquement aux individus au physique harmonieux des qualités telles que le talent, la bonté, l’honnêteté et l’intelligence. De plus, nous faisons ce jugement sans nous rendre compte que l’apparence physique nous influence.
il apparaît que les individus ayant un bon physique jouissent d’un avantage énorme dans nos sociétés. Ils sont plus appréciés, plus écoutés, plus souvent aidés, et on leur prête diverses qualités morales et intellectuelles.
Nous aimons ce qui nous ressemble. Ce fait semble rester vrai, que la ressemblance réside dans les opinions, la personnalité, le milieu, ou le mode de vie. Par conséquent, ceux qui veulent qu’on les aime pour persuader plus facilement peuvent atteindre cet objectif en paraissant semblables à nous. Ils disposent pour ce faire d’un large éventail de moyens.
L’idée que quelqu’un nous apprécie peut, par le sentiment de sympathie qu’elle suscite, être un procédé de persuasion diaboliquement efficace. C’est pourquoi nous entendons souvent ceux qui veulent obtenir quelque chose de nous nous dire des choses flatteuses ou proclamer leurs affinités avec nous.
Il y a peut-être des limites à notre crédulité, surtout quand nous pouvons être sûrs que le flatteur cherche à nous manipuler ; mais en général, nous aimons croire le bien qu’on nous dit de nous-mêmes, et nous aimons ceux qui nous le disent, même alors que la louange n’est manifestement pas sincère.
Il y a dans la nature humaine une tendance naturelle à en vouloir aux porteurs de mauvaises nouvelles, même s’ils ne sont en rien responsables de l’événement.
Les vêtements sont aussi un symbole d’autorité capable de déclencher une persuasion automatique. Quoique plus tangible qu’un simple titre, le vêtement de l’autorité est aussi facile à contrefaire.
Outre sa fonction en tant qu’uniforme, le vêtement peut symboliser l’autorité de façon plus diffuse. Les vêtements luxueux et élégants ont une aura de statut et de position sociale, comme certains accessoires tels que les bijoux et les belles voitures.
Mais Vincent réservait aux tablées de huit à douze personnes une démonstration de l’art de paraître parler contre ses intérêts. Sa technique touchait alors au génie. Quand la première personne, normalement une femme, passait sa commande, il commençait son numéro. Quel que soit le plat qu’elle ait choisi, Vincent réagissait de la même façon : il fronçait le sourcil, pianotait sur son bloc-notes, et après avoir regardé autour de lui si le patron du restaurant était dans les parages, il se penchait vers la table, d’un air de conspirateur, et confiait, de façon à être entendu de tous : « Je crains que ce plat ne soit pas aussi réussi ce soir que d’habitude. Puis-je me permettre de vous recommander le… ou encore le… ? » (Vincent citait deux plats légèrement moins chers que celui que la cliente avait choisis initialement.) « Ils sont excellents ce soir. » Par cette simple manœuvre, Vincent faisait entrer en jeu plusieurs principes d’influence. D’abord, même ceux qui ne suivaient pas son conseil avaient l’impression que Vincent leur avait rendu service en leur donnant une information précieuse sur la carte du jour. Tout le monde lui en était reconnaissant, et par conséquent, la règle de réciprocité jouerait en sa faveur au moment de décider du pourboire.
En combinant les facteurs de réciprocité et d’autorité en une seule manœuvre d’une élégante simplicité, Vincent était capable d’augmenter le montant de son pourboire, et l’addition sur la base de laquelle celui-ci était calculé. Son style témoignait d’une maîtrise parfaite, mais remarquez qu’une grande part de son profit venait d’un apparent désintéressement, qui était en fait une manière de servir ses intérêts.
Par exemple, les propriétaires à qui on indique le coût d’une isolation inadéquate de leur maison sont plus susceptibles d’effectuer les travaux nécessaires que ceux qu’on informe des économies qu’ils pourraient en tirer.
L’idée de perte potentielle joue un rôle considérable dans la prise de décisions. En fait, nous semblons plus motivés par la crainte de perdre une chose que par la perspective d’en gagner une autre, de valeur égale. Par exemple, les propriétaires à qui on indique le coût d’une isolation inadéquate de leur maison sont plus susceptibles d’effectuer les travaux nécessaires que ceux qu’on informe des économies qu’ils pourraient en tirer.
Après une conversation dans mon bureau au sujet de la rareté et de l’exclusivité de l’information, il décida d’étudier la question en utilisant son personnel. Les clients de la société, acheteurs pour des supermarchés ou d’autres détaillants de produits alimentaires, étaient appelés au téléphone de la façon habituelle par un vendeur. On leur proposait la marchandise de trois manières différentes. À un premier groupe de clients, on fit une présentation de vente ordinaire, avant de prendre simplement leur commande. Un deuxième groupe de clients entendit une présentation ordinaire, plus l’information que l’offre de viande de bœuf importée allait se réduire dans les mois à venir. Un troisième groupe eut droit à la présentation ordinaire ainsi qu’à l’information concernant la pénurie de bœuf ; mais ils apprirent par la même occasion que la nouvelle n’était pas publique ; elle provenait, leur disait-on, de certains contacts exclusifs de la société. Ainsi les clients de ce troisième groupe apprenaient que non seulement le produit n’était plus disponible de façon illimitée, mais il en était de même pour l’information à ce sujet ; la magie de l’objet rare s’exerçait doublement. Les résultats de l’expérience devinrent rapidement visibles quand les vendeurs de la société se mirent à réclamer une augmentation de l’approvisionnement parce qu’il n’y avait plus assez de stocks pour exécuter toutes les commandes reçues. Comparés aux clients qui avaient reçu seulement la proposition ordinaire, les clients qui avaient été informés d’une diminution de l’offre achetaient deux fois plus. Mais les clients les plus survoltés étaient ceux qui apprenaient cette pénurie par la voie « confidentielle ». Ceux-là achetèrent six fois plus de viande que les premiers clients. Apparemment, le fait que la nouvelle que le produit allait se faire rare soit elle-même rare la rendait particulièrement persuasive
Cette observation met en évidence l’importance de la compétition dans la recherche de ressources limitées. Non seulement nous désirons davantage un article quand il est rare, mais nous le désirons particulièrement quand nous sommes en situation de compétition. Les publicitaires essaient souvent d’exploiter en nous cette tendance. Dans leurs annonces, nous apprenons que la demande est si forte pour un certain article, que nous devons courir l’acheter, ou bien nous voyons une foule se presser aux portes d’un magasin avant des soldes, ou encore s’arracher certains produits. Le message n’est pas simplement que le produit est bon parce que d’autres personnes l’estiment tel, mais aussi que, pour obtenir ce produit, nous sommes en compétition directe avec ces personnes.
Le sentiment d’être en compétition pour des ressources rares est une importante source de motivation. L’ardeur d’un amoureux tiède resurgit dès qu’apparaît un rival.
Surtout dans les cas où la compétition directe entre en jeu, le sang afflue, le champ de vision se rétrécit, et les émotions affleurent. Dans cette réaction viscérale, la raison recule.
Ainsi, cet attrait supplémentaire dû à la rareté (les sujets déclaraient qu’ils voulaient en avoir d’autres à l’avenir et accepteraient de les payer plus cher), n’amélioraient en rien le goût de ces biscuits. Il y a là un élément important à retenir. Le plaisir ne consiste pas à jouir d’un bien rare mais à le posséder. Il est essentiel de ne pas confondre les deux choses.
Chaque fois que nous sommes en présence de pressions occasionnées par la rareté d’un bien, nous devons aussi nous demander ce que nous voulons de cet article. Si la réponse est que nous désirons l’objet pour les avantages économiques ou psychologiques, que nous pouvons retirer de la possession d’une chose rare, c’est parfait ; l’effet de rareté nous sera une bonne indication du prix que nous sommes prêts à payer pour l’obtenir : moins l’article est disponible, plus il sera précieux pour nous. Mais très souvent nous ne désirons pas les objets pour le simple plaisir de les posséder. Ce qui compte au contraire, c’est leur utilité ; nous voulons les manger, les boire, les toucher, les entendre, les conduire, ou d’une façon quelconque les utiliser. Dans ce cas, il est essentiel de se rappeler que les choses rares ne sont pas plus agréables au goût, au toucher, à l’oreille, ou à la main du simple fait qu’elles sont moins disponibles.
« À Noël dernier, j’ai rencontré un homme âgé de vingt-sept ans. Moi, j’en avais dix-neuf. Ce n’était pas mon type et, pourtant, je suis sortie avec lui – sans doute parce que ça me valorisait de fréquenter quelqu’un de plus âgé que moi. Je ne lui ai vraiment trouvé d’intérêt que lorsque mes parents ont commencé à émettre des réserves au sujet de notre différence d’âge. Plus ils m’en rebattaient les oreilles, plus j’étais amoureuse de lui. Cette histoire n’a duré que cinq mois. Mais elle se serait terminée quatre mois plus tôt si mes parents n’avaient rien eu à redire sur la question. »
Exactement comme le « tchip-tchip » du dindonneau déclenche une réaction maternelle automatique chez la dinde, même s’il est émis par un putois empaillé, « parce que » déclenchait une acceptation automatique chez les sujets de l’expérience, même si l’on ne leur donnait aucune raison véritable. Clic[4] !
Les clients, pour la plupart des vacanciers aisés n’y connaissant rien en matière de turquoises, avaient recours à un principe reconnu pour guider leurs achats : « cher = de bonne qualité ». C’est pourquoi, voulant de la bonne qualité, ils trouvaient les bijoux nettement plus précieux et désirables quand c’était leur prix qui les mettait en valeur. Le prix était en lui-même la caractéristique clé de la qualité ; et une forte augmentation du prix suffisait à pousser à l’achat des clients désireux avant tout de qualité. Clic !
En fait, les comportements automatiques, stéréotypés, sont très fréquents, car ils sont souvent les plus efficaces, et parfois, les seuls possibles. Nous vivons tous dans un environnement rempli de stimuli extrêmement divers, sans doute plus complexe et plus changeant qu’il n’a jamais été. Pour pouvoir y vivre, nous avons besoin de raccourcis. Il nous serait impossible d’analyser dans chacun de leurs aspects toutes les personnes, tous les événements et toutes les situations que nous rencontrons en une seule journée. Le temps, l’énergie, les capacités nous manquent pour cela. À défaut, nous devons très souvent avoir recours à nos stéréotypes, à nos règles empiriques pour classer les choses suivant une ou deux caractéristiques clés ; ce qui nous permettra de réagir de façon machinale en présence de ces caractéristiques.
Prenons un exemple. Il y a un principe de la perception humaine, le principe du contraste, qui affecte la façon dont nous voyons la différence entre deux choses, présentées l’une après l’autre. Pour simplifier, disons que si le deuxième objet est différent du premier, nous aurons tendance à le voir plus différent qu’il ne l’est en réalité. Ainsi, si nous soulevons d’abord un objet léger, puis un objet lourd, nous trouverons le deuxième objet plus lourd que si nous n’avions pas soulevé le premier objet. Le principe de contraste est bien établi dans le domaine et s’applique à toutes les formes de perception. Si, au cours d’une soirée, nous sommes en conversation avec une femme très belle et qu’une femme qui l’est moins vient se joindre au groupe, la seconde nous paraîtra moins séduisante qu’elle ne l’est en réalité.
Les boutiques de mode sont un bon exemple. Supposons qu’un homme entre dans une boutique de vêtements et déclare qu’il désire acheter un costume trois-pièces et un pull-over. Si vous étiez le vendeur, que lui montreriez-vous d’abord pour l’inciter à dépenser le plus possible ? Les magasins disent à leur personnel de vendre d’abord l’article le plus cher. Le bon sens semble dire le contraire : un homme qui vient de dépenser beaucoup d’argent pour un costume se montrera peut-être réticent à dépenser encore beaucoup pour un pull-over. Mais les vendeurs n’agissent pas au hasard. Ils appliquent le principe de contraste : vendre d’abord le costume, car au moment de regarder les pull-overs, même les plus chers, leur prix paraîtra raisonnable en comparaison. Un homme peut reculer à l’idée de payer un pull-over cent cinquante euros, mais s’il vient d’acheter un costume six cents euros, ces cent cinquante euros ne lui paraîtront pas excessifs. Le même principe vaut pour le client qui achète les accessoires (chemise, chaussure, ceinture) assortis à son nouveau costume. Contrairement à ce que le bon sens nous porterait à croire, les faits donnent raison à la théorie de l’effet de contraste. Comme l’écrivent les analystes en motivations d’achat Whitney, Hubin, et Murphy : « Il est notable que, même quand un homme entre dans un magasin dans le seul but d’acheter un costume, il paiera presque toujours plus cher pour les accessoires s’il les achète après le costume qu’avant. »
La société conservait sur ses listes une ou deux maisons en piteux état, et à un prix trop élevé. Ces maisons n’étaient pas destinées à la vente ; elles étaient là pour être montrées aux clients, de façon que les véritables propriétés à vendre bénéficient de la comparaison. Tous les vendeurs ne se servaient pas de ces simulacres, mais Phil s’en servait. Il disait qu’il aimait voir les regards s’éclairer quand il montrait à ses clients la propriété qu’il voulait leur vendre, après leur avoir montré les maisons en mauvais état. « La maison que je veux leur faire acheter a l’air magnifique une fois qu’on leur a montré quelques ruines. »
l’une des plus puissantes des armes d’influence : la règle de la réciprocité[7]. La règle est qu’il faut s’efforcer de payer de retour les avantages reçus d’autrui. Si quelqu’un nous rend service, nous devons lui rendre service à notre tour ; si un ami nous envoie un cadeau pour notre anniversaire, nous n’oublierons pas de faire de même pour le sien ; si nous recevons une invitation, nous devons la rendre. Par la seule vertu de la règle de réciprocité, nous voilà donc obligés à tout cela, cadeaux, invitations, services, et le reste. Il est considéré comme normal que le fait de recevoir crée une dette ; d’où le double sens du mot « obligé » dans un grand nombre de langues.